Article publié il y a une semaine sur Birganj. Ce week-end, vous pouvez lire la critique de Bloodborne.
2015, mars, 20ème jour. Le monde du jeu vidéo vit un dawa monumental. Un jeu PSP jamais sorti en dehors du Japon arrive chez nous avec 3 ans et demi de retard… Sur PS4, console next gen en manque cruel de « jeux next gen ». Le mindfuck est total quand ce jeu PSP, vendu à 50 euros est accompagné d'une démo d'un vaporware qui fête ses 9 ans de développement.
Annoncé en 2006 sous le nom de Final Fantasy Versus XIII, censé sortir en parallèle de Final Fantasy XIII en 2010, le jeu dirigé par l'équipe de Tetsuya Nomura (derrière les Kingdom Hearts), sera renommé plus tard en Final Fantasy XV pour être dirigé par Hajime Tabata, réalisateur du fameux jeu PSP porté sur PS4, c'est à dire Final Fantasy Type-0. Un moment quelque peu étrange partagé en espoir de voir porté un jeu attendu depuis 4 ans (la traduction officieuse par des fans étant sorti à peine quelque mois avant) et toucher enfin à un Final Fantasy à l'époque ambitieux. Cet article va non pas donner une critique d'une démo, ce serait ridicule mais on va essayer de voir ce qu'elle nous a apporté, si elle nous donne un bon aperçu du jeu à venir… ou si en fait, ça sent le gros pétard mouillé.
Episode Duscae : des bases basiques
Dans cette démo, le groupe de Nocto (en fr : Noct, diminutif de Noctis mais entendre sans arrêt « Nocto » en japonais incite à l'appeler par son nom en VO), personnage que le joueur contrôle exclusivement accompagné de ses potes et gardiens (Nocto est un prince), doit trouver de l'argent pour réparer leur voiture avec laquelle ils traversent le monde. La seule façon d'obtenir les 25 000 gils est de chasser le Behemoth pour en revendre ses cornes (enfin, ici il n'en reste qu'une sur la bête). Le joueur a le loisir d'explorer un morceau de la plaine du coin pour apprendre à jouer et surtout grimper de niveau. Nocto débute au niveau 4 et on pourra s'attaquer au Behemoth sans craintes au niveau 20. Dans ce morceau de plaine, vous aurez accès à une boutique pour de la nourriture (on y reviendra), une grotte… et c'est tout. Vous avez des objectifs secondaires qui vous rapporteront de l'expérience, comme allez voir les chocobos sauvages, ou retrouver une pierre précieuse ou éliminer x loups. C'est pas compliqué, vous suivez la croix sur votre map et c'est bouclé. Donc, concrètement, à part farmer, vous ne ferez pas grand-chose.
Vous allez ainsi vous bastonner en boucle dans des niveaux ouverts en caméra libre, vous voyez les ennemis à l'écran, certains sont agressifs, d'autres inoffensifs et certains s'invitent pendant les combats. Tout est en temps réel et le joueur passe de l'exploration à l'action dès son premier coup. Chaque ennemi sauvage respawn régulièrement entre chaque zone visitée. Le fait de leveller dans ces conditions rappellent énormément Final Fantasy XII, la chasse au Behemoth renforce cette impression puisque la chasse était le cœur du dernier épisode PS2, transformant le levelling ennuyeux en défis de différents niveaux.
Les combats sont très surprenant, ils ressemblent vaguement à Lightning Returns, avec un bouton d'attaque et un bouton défensif à jouer en timing. Mais c'est ici bien plus simple, il suffira de laisser le bouton d'attaque appuyer et votre personnage enchaînera ses attaques tout seul. Quant à la garde, il s'agit en fait d'une esquive automatique. Néanmoins, les attaques ennemi souvent imprévisibles et comme nous ne sommes pas dans un beat'em all, appuyer sur L1 (esquive) en réflexe ne servira à rien, il faut anticiper. Quelques petites nuances manuelles subsistent : vous pouvez esquiver manuellement en combinant L1+rond et surtout il existe des attaques que Nocto ne peut esquiver automatiquement. Dans ces cas là, un petit symbole sur la tête de l'ennemi apparaît. A l'inverse de n'importe quel jeu d'action, ce n'est pas au joueur de choisir le bon timing pour contre-attaquer. Le joueur doit conserver sa garde et appuyer sur carré au moment où l’icône du bouton en question apparaît dans un lap très court. Et ré-appuyer de manière à lancer une contre-attaque personnalisée à chaque monstre (gros coup de lance sauté, lance rabattue, etc). Quand vous êtes face au monstre, c'est d'une facilité déconcertante. Quand la caméra s'emballe et que l'attaque arrive à moitié hors-champs ou de dos, la manip n'est pas cheaté au point de tout automatiser. La caméra donc, est très problématique. Elle virevolte dans tous les sens et le fait de voir des ennemis qui bougent dans tous les sens rend certaines scènes très « Benny Hill » à courir partout dans le vide. Seule solution : locker l'ennemi avec R1 et appuyer croix pour se téléporter vers lui. Il pourra toujours esquiver (cette feature ne s'applique pas qu'aux héros) mais au moins vous ne taperez pas à côté, la caméra suivra votre cible et ce sera plus agréable à jouer. Bien que les combats soient en temps réel, FFXV n'en reste pas moins un RPG. Et ce n'est donc pas le skill qui compte (il n'y en a aucun ou presque) mais vos stats, donc votre niveau. Vous mourrez ainsi régulièrement si vous n'êtes pas à niveau (la plaine de jeu a grossomodo trois niveaux de difficulté où l'on peut voir des ennemis plus nombreux et plus résistants en avançant). Mais pour insister sur cet aspect « bourrin », certains diront « dynamique » pour ne pas froisser leurs espérances, le héros ne meurt pas si ses HP tombent à zéro. Quand c'est le cas, il ne peut plus combattre, il faut donc soit se soigner avec une potion, soit votre allié le fait automatiquement (ce qui finit par devenir rare à la fin de la démo). En revanche, si vous perdez tous vos HP max, vous mourrez. Et surtout une potion ne vous fait pas remonter vos HP max, il faudra dormir pour les récupérer. Bref, quand vous vous faites laminés, le game over n'est pas automatique et vous incite à leveller. Notons aussi qu'il y a des points d'action qui baissent à chaque utilisation de techniques spéciales. Il s'agit en fait des MP mais ils fonctionne comme des points d'action. Le scénario explique ça. En plus de simples coups d'épées automatiques, Nocto a des attaques spéciales occasionnant plus de dégâts avec chacun ses défauts. En effet, « sauter » (attaque traditionnelle des lanciers de la série) est très puissant mais le héros prend quelques secondes dans les airs, le temps pour l'ennemi de fuir. La tornade est efficace pour cibler plusieurs ennemis, et la dague vampirique vous redonne des HP. En plus de ça, Nocto a des attaques surpuissantes qui bouffe ses points d'action (pluie d'armes en zone). Heureusement, des attaques simples ne consomment pas de MP, elles vous en font gagner et remontent à chaque combat. Tout comme vos HP. Nous sommes donc en présence d'un système de combat très simple, qui mise tout sur l'intensité du moment. Le joueur a ainsi tout le loisir de dépenser ses grosses attaques, de flirter dans le rouge avec sa santé, ce sera tout bénef. Cette incitation au « bourrinage » est renforcé par un compteur de points en fin de combat. Selon votre temps, les dégâts reçus et le nombre de parades effectuées, votre multiplicateur de points d'expérience sera plus grand. FFXV est donc là pour de l'action pur et dur… En l'état actuel des choses, si le dynamisme du système de combats permet de vite faire passer la pilule du nombreux farming à venir, on n'a vu strictement aucun élément de tactique. Pour l'instant, nous n'avons pas de buff/debuff en vue, pas de différenciations entre attaques, pas de points faibles ou forts des ennemis… C'était vraiment trop basique. Et pas grand-chose ne nous dit si sera le cas dans le jeu final car les menus – à part l'inventaire et l'équipement de Nocto - étaient bloqués.
FFXV : l'immense part d'inconnu
Si les attaques basiques de Nocto sont automatisés par un seul bouton, il n'en a pas moins des variantes. Son enchaînement est composé de la sorte : première attaque, enchaînement, attaque finale. Et enfin, à part, attaque sautée que vous pouvez déclencher manuellement. Et déterminer l'attaque de la riposte. Nocto invoque différentes armes, contrairement à ses potes qui ont chacun une arme de prédilection (zanbato, dagues et pistolets). Le joueur a ainsi la liberté de choisir quelle arme sera utilisée pour chaque action dans les menus. Chaque arme à ses caractéristiques (vitesse, force) et des compétences spéciales (brise garde, vampiriser HP, redonner MP). A vous donc de concevoir vos enchaînements : débuter par un coup rapide ? Un brise garde lent ? Une bonne allonge de lance ? L'astuce étant que vous ne pouvez utiliser deux fois une même arme, sinon ce serait trop facile. Dans la démo, il n'était pas très utile de changer car les ennemis ne sont pas forts et parce que le jeu était réglé pour leveller très très rapidement. Mais dans le jeu complet, on comprend que favoriser tel ou tel enchaînement sera important selon les ennemis. Maintenant, faudra voir l'ergonomie de la chose (pour l'instant, il n'y a pas de presets) et surtout la richesse des armes car c'est de ça que tout le gameplay dépendra. Nous n’avons pas vu non plus d'équipement pour la défense, aucun accessoire… Un menu « compagnons » est présent mais inaccessible, elle pose la question de la gestion des alliés. Soit leur équipement futur (le réalisateur a promis qu'on pourra les équiper d'armes secondaires mais on n'en a rien vu dans la démo), soit leur IA (ou gambits si on repense à FFXII dont il semble partager le level-design). Bien que nous n'avons pas vu une simple magie « carapace », « booster »… ou même « feu » ou « glace », Square Enix nous a placé une invocation en plein cul de sac d'une grotte (ça devrait être scénarisé différemment dans le jeu final puisqu'il faudra les battre avant des les invoquer), avec Ramuh, le dieu de la foudre. On ose espérer donc que les magies traditionnelles accompagnent le gameplay, ou peut être sous forme de modification d'arme, mais on est sûr que les invocations seront à nouveaux épiques. Fini les machins qui deviennent des personnages à part entière et meurent comme des boulets ! On n'avait plus vu d'invocation spectaculaire depuis FFX, ce qui remonte à loin. Ici, pour invoquer Ramuh, le héros doit avoir ses HP à zéro, alors le bouton croix apparaît, il faut laisser appuyer pendant 4 ou 5 secondes (évitez de mourir avant) et la cut scène s'incruste en douceur avec un Ramuh géant qui laisse une zone carbonisée et fumante derrière lui… Les fans seront aux anges. Le fait d'implanter à nouveau des invocations nous fait espérer ainsi la présence d'éléments classiques de la série, dont des magies élémentaires, et donc des points faibles ennemis et donc par conséquent un minimum de sens stratégique que l'on n'a absolument pas vu dans Duscae. Les magies sont prévues selon le réalisateur mais on n'a aucune idée de leur forme.
La présence d'objectifs secondaires et d'une chasse aux monstres nous donne aussi à espérer beaucoup de choses à faire dans le jeu final, avec une liberté certaine. La présence de chocobos sauvages aussi, la récolte de plumes, ainsi que la présence de ferme nous incite à penser à des quêtes annexes sur l'élevage de chocobos. Vu la topographie des lieux, le jeu semble très très ouvert où le joueur aura la liberté de rouler en vitesse à bord de sa voiture pour allers aux endroits clés (villes, villages, stations) et de s'arrêter pour découvrir la campagne et les zones sauvages, propice aux objectifs secondaires ou au levelling. On pense aussi qu'un petit trip culinaire du genre « collecter un maximum de recettes » sera de la partie, puisque lorsque le joueur se reposera sur des campements, il pourra dîner. Il se servira alors de la viande des animaux éliminés et de sa cueillette ou des aliments achetés en magasin. Chaque recette étant illustré par un beau plat en plein écran, et la démo étant fourni en aliments diverses, ce sera un trip en plus. Loin d'être futile, la bouffe vous donne des bonus la journée : plus de vigueur, plus d'exp, etc. Au joueur de découvrir les apports de chaque repas. Une bonne idée qui, on espère, sera variée.
Notons aussi que le boss de cette démo a un combat scénarisé. C'est à dire que vous allez le tabasser de quatre-cinq coups et vos partenaires vous demanderont de fuir. On élimine le boss en invoquant Ramuh et ses stats craqués. Si vous relancez la démo après la cut scene de fin, on peut le rebattre comme on le souhaite, jusqu'à ne plus avoir besoin de Ramuh, quitte à grimper au niveau 50 ou même 99. Par conséquent, on sait que certains combats seront scénarisés, mais le fait que l'on peut combattre l'animal normalement sème le doute sur son degré de contextualisation. Parceque cette démo ne veut pas frustrer les joueurs, les stats et donc la difficulté du jeu n'est pas représentatif du jeu. Malgré les lacunes des derniers épisodes, Final Fantasy n'a jamais eu la réputation d'être très facile et a toujours été équilibré. Ça ne devrait pas changer ici… Malheureusement, ce n'est qu'une supposition puisque les stats étant bien cheatés, impossible de jauger correctement les phases d'action ou la courbe de progression.
Petit mot sur la technique et l’univers du jeu. Autant le gameplay pose encore énormément de questions et sa solidité dépendra de la richesse des menus, autant la partie visuelle du titre est dans l'expectative. Avec une résolution de 900p (sur PS4 – 720p sur One) et un framerate instable (30 fps max avec chutes très notables), on soupçonne Duscae être un bon vieux build qui date de quelques années. Le jeu sent bon le développement PS3 aussi. De la PS3 avec anti-aliasing et effets de lumière mais technique PS3 quand même par la faiblesse des textures mais surtout d'une absence de relief de l'environnement via les shaders (les personnages sont réussis et font illusion en cut scenes mais ce n'est pas le jeu à proprement parlé). Le décors choisi n'est pas non plus propice pour impressionner : de l'herbe, de l'herbe et un peu de flotte avec un pachyderme de 15 mètres qui boit… Ah et une grotte sombre. Bref, rien de resplendissant. La distance d'affichage est cependant de bonne facture, le sol est dense en éléments dupliqués… Les PNJ sont aussi rigides, on peut les écouter parler et on espère que les villes auront leur lot de dialogues pour rendre vivant ce petit monde. La physique du jeu doit cependant être grandement amélioré, les collisions entre personnages sont mal gérés. Il n'est en effet pas rare de voir son passage bloqué par un allié. Et pour un jeu intégralement en temps réel, il sera souhaitable de corriger ce pathfinding douteux. On ne jugera pas ici de la direction artistique, le boys band a subi suffisamment de moqueries pour voir que le public a déjà son opinion. Notez que jouer en japonais avec les dialogues aléatoires pendant la promenade est agréable et va grandement aider à rendre ces personnages sympathiques. Comme toujours, c'est la qualité d'écriture qui fera en sorte de briser ce premier contact superficiel. On se permettra de faire remarquer qu'ils n'ont pas l'air d'être dans le pathos à la Snow ou Hope de FFXIII… Côté scénario, tout est encore très flou mais on retrouve le classicisme des FF traditionnels puisque l'Empire a attaqué et pris le contrôle le Royaume de Nocto, qui en jeune Prince, doit lutter, accompagné de ses gardiens. Vous aviez Yuna et ses gardiens de FFX, vous aviez la princesse Grenat de FFIX et ses… ben gardiens, vous avez le Prince Nocto et ses gardiens. Bref, rien de nouveau là dedans mais ça pourrait rassurer certains fans. Les trailers d'il y a quelques années donnaient en effet un aspect tragique un peu trop prononcé, presque caricatural (du Nomura quoi) à l'ambiance de ce FFXV. En fait, Nocto est lié au monde des défunts grâce à la déesse Etro (mentionné dans FFXIII mais il n'y a aucun lien direct… normalement) tout comme le personnage de la princesse Stella, dans un royaume opposé. L'aspect bande de potes est pour l'instant mis en avant, mais les éléments montrent une espèce de triangulaire entre les territoires en guerre : Nocto, Stella et l'Empire. A confirmer car tout est maintenu secret.
Cette démo de FFXV pose finalement plus de questions qu'elle n'en répond. En limitant la démo à du bête farming bourrin et des stats gonflés, difficile de voir la capacité de renouvellement de gameplay. Cependant, en creusant un peu dans les menus, voir la customisation des attaques avec armes bien caractéristiques, voir cette invocation qui sauve la démo de la monotonie, repérer très rapidement la cartographie des lieux, le jeu a un très bon potentiel. Une sorte de FFXII ultra offensif. S'il a autant d'objectifs que celui ci, on risque de s'amuser. Maintenant, avant de spéculer, la démo en l'état n'est pas très vendeuse. Il faut vraiment faire preuve de déduction pour y voir son potentiel car ces combats dans un framerate asthmatique et des collisions lourdes donneront peu envie aux joueurs exigeants. Il faudra cependant patienter jusqu'à un bon gros 2016 pour avoir le jeu complet sous la main… Il y a encore du boulot.
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